Oiseaux, chauves-souris et éoliennes : quelle cohabitation ?

Les éoliennes sont régulièrement critiquées pour leur impact sur la faune volante, oiseaux et chauves-souris. Qu’en est-il exactement ? Alors que l’on assiste à une chute générale de la biodiversité en France(1), en Europe et dans le monde, peut-on estimer que les éoliennes contribuent à ce recul ? Les éoliennes peuvent-elles cohabiter avec l’avifaune (l’ensemble des espèces d’oiseaux) et la chiroptérofaune (l’ensemble des espèces de chauve-souris) ?

Les éoliennes sont régulièrement critiquées pour leur impact sur la faune volante, oiseaux et chauves-souris. Qu’en est-il exactement ? Alors que l’on assiste à une chute générale de la biodiversité en France(1), en Europe et dans le monde, peut-on estimer que les éoliennes contribuent à ce recul ? Les éoliennes peuvent-elles cohabiter avec l’avifaune (l’ensemble des espèces d’oiseaux) et la chiroptérofaune (l’ensemble des espèces de chauve-souris) ?

Depuis le développement de l’énergie éolienne, les incidences sur les oiseaux ont été largement étudiées et les moyens d’éviter, de réduire et de compenser ces effets sont connus. Parmi ces moyens, le choix du site d’implantation, en s’appuyant sur des expertises préalables locales, la conception du projet éolien ou la manière de faire fonctionner les éoliennes, s’appuyant sur les retours d’expériences. En ce qui concerne les chauves-souris, les connaissances sont plus récentes, mais les moyens de réduction des impacts sont les mêmes. Ils permettent d’envisager la cohabitation entre éoliennes et faune volante.

Au-delà du nombre global d’oiseaux ou de chauves-souris tués, c’est l’espèce impactée, ordinaire ou pas, menacée ou pas, qui est le facteur déterminant. Dans tous les cas, la mortalité sur la faune volante liée aux éoliennes est faible par rapport à d’autres facteurs : prédateurs (chats), collision avec des parois vitrées/fenêtres d’immeubles, circulation automobile, lignes électriques, etc..

L’état de la question pour les oiseaux

Les effets connus des éoliennes sur les oiseaux

Les premiers parcs éoliens français ont fait l’objet de suivis de mortalité sur les oiseaux dès 19971. Depuis le classement des éoliennes en Installation Classée pour la Protection de l’Environnement, en 2011, chaque parc éolien doit faire l’objet d’un suivi de ses impacts sur la faune volante durant les trois premières années de fonctionnement. Nous disposons ainsi d’une connaissance approfondie des effets, négatifs et positifs, des éoliennes sur l’avifaune. Ils sont de trois types.

  • Une mortalité par collision avec les pales

Le premier impact, et le plus visible, concerne les collisions des oiseaux avec les pales des éoliennes. Il peut en effet être difficile pour les oiseaux d’éviter les pales des éoliennes, dont la vitesse aux extrémités peut atteindre 250 km/h.

Cet impact concerne toutes les espèces d’oiseaux présentes en hauteur, mais certaines sont plus sensibles que d’autres au risque de collision, notamment les grands rapaces planeurs2.

Ainsi, parmi les premiers suivis de mortalité, l’exemple de parcs éoliens à Tarifa, au sud de l’Espagne, est particulièrement révélateur de la problématique : sur près de deux cent espèces fréquentant les lieux, deux espèces représentaient 85 % de la mortalité. Tout d’abord, le Faucon crécerelle, espèce peu farouche qui vole à hauteur de pales, concentré sur la chasse de ses proies volantes qui en oubliait le danger présenté par les pales en mouvement. Ensuite, le Vautour fauve, oiseau peu agile, qui n’a pas su s’adapter aux éoliennes installées entre son dortoir et la décharge d’ordures ménagères qu’il fréquentait.

Un autre enseignement est apparu après ces premiers suivis : pas d’hécatombe d’oiseaux blessés ou tués, comme cela peut arriver pour d’autres aménagements comme les phares en bord de mer qui attirent par leurs lumières les oiseaux en migration3. Toutefois, certains parcs éoliens sont plus dangereux que d’autres en raison de leurs localisation et configuration.

  • Une perte de territoire de chasse

Le deuxième impact du fonctionnement des éoliennes, moins connu, concerne la perte de territoire de chasse, en particulier pour certaines espèces de rapaces. L’exemple typique est celui de l’Aigle Royal qui, par crainte du grand objet en mouvement qu’est l’éolienne, s’en éloigne et se trouve ainsi privé d’une partie de son territoire de chasse (mammifères, passereaux…). Cette perte de territoire peut atteindre un rayon de 200 mètres autour des éoliennes, et mettre en péril la survie d’un couple, si des mesures de compensation ne sont pas mises en œuvre.

  • Une dépense énergétique supplémentaire

Le troisième effet négatif concerne la dépense énergétique supplémentaire pour les oiseaux en déplacement, obligés de contourner quotidiennement l’obstacle éolien. Ce contournement peut également mener l’oiseau vers un autre danger, comme une ligne électrique à haute tension ou une voie routière.

La compréhension de la question des incidences des éoliennes sur les oiseaux doit également considérer les éléments suivants :

  • Les enjeux ne sont pas les mêmes entre les quelques trois cents espèces fréquentant le territoire métropolitain français. Au-delà de leurs sensibilités à l’aménagement éolien (cf. l’exemple précédent de Tarifa), certaines espèces sont rares, menacées ou emblématiques, comme les aigles, les vautours, certains rapaces, certains oiseaux de plaine. La mortalité d’un oiseau d’une de ces espèces sera d’autant plus préjudiciable que l’espèce est en régression et que la population locale est de faible importance.
  • Les oiseaux peuvent être globalement classés en deux catégories en termes de comportements vis-à-vis des éoliennes et d’incidences négatives. D’une part, les oiseaux craintifs effarouchés par les pales des éoliennes en mouvement et qui vont donc s’en éloigner, avec une perte de territoire de chasse associée. D’autre part, les oiseaux moins farouches qui vont s’approcher des éoliennes et risquer la collision.
  • Le choix du site éolien et la compréhension de son utilisation par les oiseaux, puis l’agencement des éoliennes et les modalités de leur fonctionnement vont être essentiels.
  • La migration des oiseaux au printemps entre l’Afrique et le nord de l’Europe, et entre le nord de l’Europe et l’Afrique à l’automne, est un phénomène particulièrement meurtrier pour certaines espèces. Le risque est lié aux conditions difficiles de parcours, à la météo, aux difficultés d’alimentation, à la prédation, à la chasse, etc. Les pertes seront, globalement, sans commune mesure avec celles liées aux éoliennes bien que ces dernières soient un danger supplémentaire, surtout si l’agencement du parc éolien ne prend pas en compte le phénomène migratoire4.
  • Enfin, il y a lieu de noter des incidences positives de l’implantation des éoliennes sur certaines espèces d’oiseaux fréquentant les milieux ouverts (c’est-à-dire constitués d’une végétation de faible hauteur). En effet, les règles de débroussaillement au pied des éoliennes pour la Défense des Forêts Contre les Incendies (DFCI) vont créer des milieux favorables pour des espèces comme certains passereaux.

Ces constats montrent la nécessité et l’intérêt des expertises préalables sur un site éolien potentiel pour caractériser les enjeux, à savoir préciser les espèces fréquentant les lieux et leur manière d’utiliser l’espace.

Une éolienne tue en moyenne moins de 10 oiseaux par an

La mortalité des oiseaux liée aux éoliennes est dépendante du site d’implantation, de la conception du parc éolien en termes de gabarit des machines et de leur organisation, et du comportement des espèces d’oiseaux fréquentant le site.

Estimer cette mortalité est compliqué pour plusieurs raisons liées à la difficulté de trouver les cadavres. L’efficacité de la recherche dépendra de la taille de ces cadavres, de l’occupation du sol et donc de la possibilité de les apercevoir, de la fréquence des passages de recherche mais aussi de la vitesse de disparition de ces cadavres liée notamment à la prédation (et à la vitesse de décomposition). Il y a lieu ainsi de distinguer la mortalité brute observée de la mortalité réelle estimée (il existe plusieurs méthodes scientifiques de calcul).

Par ailleurs, la mortalité d’un individu d’une espèce donnée n’aura pas les mêmes conséquences sur les populations locales selon qu’il s’agisse d’espèces patrimoniales, rares ou menacées ou bien d’espèces ordinaires. Ainsi certaines espèces d’oiseaux font l’objet de lourdes campagnes de réintroduction ou de préservation, traduisant leur rareté et fragilité. Ce sont en particulier les espèces faisant l’objet d’un Plan National d’Actions (PNA) : l’Aigle de Bonelli, le Grand Tétras, l’Outarde canepetière, la Pie-grièche, le Milan royal, les vautours, etc.

Ceci étant, des valeurs de mortalité peuvent être données : elles sont inférieures à 10 oiseaux par éolienne et par an. Dans une vaste étude conduite en France5, la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) calcule, sur huit parcs éoliens localisés en zones sensibles, une mortalité médiane de 4,5 oiseaux et une mortalité moyenne de 7 oiseaux par éolienne et par an.

Une mortalité de l’avifaune peu significative comparativement à d’autres causes

Si les éoliennes peuvent être une source d’impact sur les oiseaux, il est intéressant de les comparer avec les autres causes susceptibles de leur porter également atteinte.

L’illustration suivante met en évidence les principales causes de mortalité des oiseaux aux États-Unis. Elle est transposable à la France, les aménagements et les oiseaux étant globalement les mêmes.

Ainsi, les principales causes de mortalité des oiseaux sont les suivantes, par ordre décroissant d’importance : les chats, la collision avec des parois vitrées/fenêtres d’immeubles, la circulation automobile, les lignes électriques, etc. Au regard du nombre d’oiseaux tués, les éoliennes ne font pas partie des principales causes de mortalité des oiseaux.

Des moyens existent pour diminuer ces effets négatifs

La diminution des impacts sur l’environnement en général, et de ceux des éoliennes sur l’avifaune en particulier, s’appuie sur une méthode, réglementairement définie, intitulée ERC (Éviter – Réduire – Compenser).

Cette analyse est conduite dans l’étude d’impact sur l’environnement, document constitutif essentiel du dossier de demande d’autorisation de construire et d’exploiter tout parc éolien, consultable par toutes les personnes intéressées lors de l’enquête publique6.

  • Éviter

Les moyens pour éviter les incidences négatives des éoliennes sur l’avifaune sont par nature prises en amont et concernent principalement le choix du site d’implantation. Cette sélection, ou non-sélection, pourra résulter de l’analyse des sites avifaunistiques protégés ou d’intérêt que sont en particulier les Zones de Protection Spéciale (ZPS) du réseau Natura 2000. Cette sélection, ou non-sélection, pourra résulter également des conclusions des expertises de terrain requises pour tout projet éolien, selon des pressions d’observation déterminées par les services de l’État (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement – DREAL) et/ou dans des guides méthodologiques nationaux ou régionaux.

  • Réduire

Les moyens pour réduire les incidences négatives des éoliennes sur l’avifaune concernent tout d’abord la conception du parc éolien, puis les conditions de fonctionnement des éoliennes. En ce qui concerne la conception du parc, on évitera les lignes d’éoliennes perpendiculaires à l’axe des migrations, on créera des « trouées » dans une ligne d’éoliennes pour canaliser le flux des oiseaux et réduire l’effet barrière, on s’éloignera des falaises et des zones humides susceptibles d’héberger des espèces sensibles, etc.

Il existe également depuis quelques années des outils de haute technologie basés sur la détection automatique et en direct d’approche de grands oiseaux et le déclenchement de procédures en cas de risque de collision : tout d’abord une procédure d’effarouchement sonore pour faire fuir l’oiseau qui se rapproche dangereusement, puis, s’il continue à se rapprocher, un arrêt automatique de l’éolienne. La mise au point de ces outils se poursuit, certains étant déjà installés sur des parcs éoliens.

  • Compenser

Les moyens pour compenser les incidences négatives des éoliennes sur la faune volante ne concernent que certains cas (car les étapes « éviter » et « réduire » suffisent le plus souvent), comme celui de la perte de territoire de l’Aigle royal effarouché par les éoliennes. Il s’agira alors de favoriser le maintien ou la création de milieux ouverts favorables aux proies et donc à la chasse de cet aigle, par exemple par le débroussaillement de zones en garrigue.

« Comprendre » reste le préalable à l’application de cette séquence ERC : quelles sont les espèces fréquentant le site ? Quelles sont leurs sensibilités vis-à-vis des éoliennes ? Quels sont leurs comportements sur le site éolien ?

Démarche Éviter, Réduire, Compenser – Crédit schéma : MTES

L’état de la question pour les chauves-souris

Les effets connus des éoliennes sur les chauves-souris

De la même manière que les oiseaux, les chauves-souris (ou chiroptères) sont susceptibles d’être impactées par les éoliennes, avant tout par des collisions avec les pales : il s’agit alors de collisions indirectes se traduisant par des barotraumatismes mais aussi de pertes de territoire. Les différences qui caractérisent ces mammifères volants par rapport aux oiseaux vont déterminer les enjeux et les incidences associés.

Seulement une trentaine d’espèces de chauves-souris fréquentent le territoire national, ce qui facilite l’analyse des enjeux et des risques. La hauteur de vol des espèces, bien au-dessus de la canopée des arbres et donc la probabilité de se retrouver à hauteur de pales d’éoliennes, va déterminer les risques de collision. Les retours d’expériences sont capitalisés au niveau européen7.

Les chauves-souris utilisent les linéaires boisés (lisières, haies, allées forestières, ripisylves) pour se déplacer et y rechercher leur nourriture (insectes). De même, certaines chauves-souris gîtent dans des arbres. La proximité des éoliennes par rapport aux milieux boisés est donc un élément important pour déterminer les risques d’impact ; la Société française pour l’étude et la protection des mammifères fait ainsi un certain nombre de recommandations8.

Enfin, les chauves-souris sont des animaux qui hibernent, et sont donc présents dans l’espace aérien seulement une partie de l’année (pour la plupart des espèces, de mars à octobre inclus). Ce sont également des animaux nocturnes, donc présents seulement une partie de la journée. Ce sont enfin des animaux de petite taille, qui ne sortent pas ou très peu de leurs gîtes lorsque le vent est moyen à fort, ou lorsqu’il pleut.

Ainsi, la confrontation entre éoliennes et chauves-souris concerne des plages de temps limitées : seulement une partie de l’année, seulement les nuits et lorsque la vitesse du vent n’est pas trop élevée.

Une mortalité plus forte pour les chauves-souris

C’est lors de suivis de la mortalité d’oiseaux que des chauves-souris ont été découvertes sous des éoliennes. La problématique est ainsi plus nouvelle, mais elle est aussi plus forte : les chauves-souris touchées par des éoliennes sont plus nombreuses que les oiseaux qui en sont victimes. Ainsi, la LPO a recensé dans sa vaste étude française5 1279 cadavres de chauves-souris contre 1102 d’oiseaux.

Sur le plan règlementaire, au contraire des oiseaux, toutes les espèces de chauve-souris sont protégées. Ceci étant, certaines sont plus patrimoniales que d’autres. C’est leur comportement et en particulier leur utilisation ou non de l’espace au-dessus de la canopée, avec le risque de confrontations avec les pales des éoliennes, qui va déterminer leur degré de sensibilité.

Des moyens existent pour diminuer ces effets négatifs

  • Éviter

Les moyens pour éviter les incidences négatives des éoliennes sur les chiroptères sont par nature en amont et concernent le choix du site d’implantation. On évitera ainsi la proximité des gîtes d’importance, en particulier ceux abritant des espèces connues pour être impactées par les éoliennes.

À l’échelle du projet, l’implantation des éoliennes loin des haies, des lisières forestières ou encore des zones humides permettra d’éviter les lieux que les chauves-souris fréquentent le plus. Pour la réalisation des pistes et l’implantation des machines, on préservera les arbres susceptibles de constituer des gîtes.

  • Réduire

Les moyens pour réduire les incidences négatives des éoliennes sur les chauves-souris concernent la programmation automatique du fonctionnement des éoliennes, en arrêtant de façon préventive les éoliennes à risque aux périodes à risque. Ces périodes à risque seront tout ou partie des nuits de six à huit mois de l’année avec des vitesses de vents faibles où les chauves-souris sont susceptibles de se trouver à hauteur des pales des éoliennes en mouvement. Ces périodes à risque sont déterminées, site par site, en conclusion des expertises préalables de terrain. L’expérience montre que les pertes de production électrique, liées à l’arrêt temporaire des machines, atteindront au maximum 1 % voire 2 % de la production annuelle, affectant donc peu la rentabilité économique du parc éolien.

Ces dispositifs d’arrêt préventif ont fait leur preuve et sont dorénavant installés sur la majorité des nouveaux parcs d’éoliennes. Le réglage de ces dispositifs (période de l’année et vitesse de vent en dessous de laquelle les éoliennes seront arrêtées) résulte de la connaissance des chauves-souris fréquentant le site via des écoutes en altitude sur un cycle annuel.

  • Compenser

Les moyens pour compenser les incidences négatives des éoliennes sur les chauves-souris concernent par exemple la protection matérielle et/ou règlementaire, ailleurs, de gîtes à chauves-souris (qui seraient menacés par des activités humaines) ou bien la préservation, là aussi ailleurs, d’îlots de sénescence.

Tout comme pour les oiseaux, « comprendre » est un préalable à l’application de cette séquence ERC : quelles sont les espèces fréquentant plus particulièrement le site ? Quels sont leurs comportements sur le site éolien qui déterminera leurs sensibilités vis-à-vis des éoliennes ? On remarquera à cette occasion que les expertises préalables aux projets éoliens et les suivis de fonctionnement ont augmenté considérablement les connaissances sur les chiroptères, un groupe animal jusqu’alors peu étudié.

Comparaison des impacts avec d’autres aménagements et équipements

Les autres aménagements ou équipements susceptibles d’impacter les chauves-souris sont en premier lieu la disparition ou la modification de leurs gîtes (rénovation de bâtiments, fermeture de grotte, abattage d’arbres, etc.), les pratiques agricoles intensives, avec l’utilisation de produits phytosanitaires qui affectent les insectes dont les chauves-souris se nourrissent, l’assainissement de zones humides milieux favorables aux insectes, etc.

La circulation automobile est également responsable de mortalités significatives9, avec des mortalités de 10 et 26 chauves-souris par kilomètre et par an, observées lors de suivis hebdomadaires de longue durée.

D’autres effets des éoliennes sur la biodiversité

De façon générale, des observations de terrain conséquentes, effectuées préalablement sur les sites éoliens potentiels par des experts confirmés, sont exigées par les services de l’État, sur un cycle annuel complet. Par ailleurs, des guides nationaux et régionaux fixent les minimas en termes de journées d’observations et de méthodologie. Ces observations permettent de caractériser les enjeux biodiversité préalables dans le cadre de la démarche Before-After-Control-Impact (BACI).

Si les suivis de fonctionnement des parcs éoliens montrent et quantifient des impacts sur la faune volante, oiseaux et chauves-souris, existe-t-il d’autres effets des éoliennes sur la biodiversité ?

La destruction de milieux naturels lors de la phase de travaux est un impact à considérer, directement sur ces milieux et le cortège d’espèces qui l’accompagne. La période du chantier déterminera le niveau des destructions ou des dérangements qui seront plus forts si les travaux ont lieu au printemps. Le printemps est en effet une saison particulièrement sensible : c’est la période de reproduction de la plupart des espèces et elles sont alors particulièrement vulnérables (jeunes pas ou peu mobiles par exemple). La mesure de réduction des impacts consistera à ne pas démarrer les travaux au printemps. Ils pourront débuter avant, à condition de se poursuivre sans discontinuité de façon à ce que les espèces animales ne s’installent pas sur le site éolien en chantier, ou bien après.

Il n’est pas connu d’impacts particuliers du fonctionnement des éoliennes sur les insectes en général ni les insectes pollinisateurs en particulier. L’explication réside dans le fait que les insectes volent habituellement bien en-dessous du point bas des pales, qui est d’une trentaine de mètres au minimum.

En ce qui concerne la faune terrestre, le fonctionnement des éoliennes n’a pas d’impact particulier. Un parc d’éoliennes ne crée pas d’effet barrière car il est dépourvu de clôtures. En revanche, la phase de chantier va induire un dérangement temporaire des espèces animales présentes localement. En fonctionnement, il n’est pas connu d’impacts significatifs, hormis ceux cités précédemment. Des dérangements sont toutefois possibles en lien avec la fréquentation des lieux, soit pour des raisons de maintenance, soit, beaucoup plus souvent, par les promeneurs et les curieux qui profitent des chemins d’accès. Il n’est pas connu d’impacts notables sur la faune sauvage liés aux bruits des éoliennes ou aux ombres portées des pales en mouvement qui, dans tous les cas, sont limités à un périmètre très proche.

Pour la flore patrimoniale, c’est également la phase de chantier qui est susceptible d’entrainer des destructions.

L’enseignement majeur des nombreux suivis d’impacts des parcs d’éoliennes porte sur le besoin d’une connaissance précise des espèces fréquentant les sites d’implantation projetées, car les sensibilités et la patrimonialité sont très variables.
On retiendra également que les impacts sur la faune volante se produisent quand le rotor est en mouvement et qu’il est possible d’arrêter ponctuellement et automatiquement les éoliennes pendant les périodes à risque : de façon préventive pour les chauves-souris et par détection d’approche pour les rapaces. Dès lors, la cohabitation est possible entre éoliennes et faune volante, au détriment d’une (faible) perte de production électrique.
La mortalité sur les oiseaux et les chauves-souris liée aux éoliennes est très faible par rapport à d’autres facteurs : prédateurs (chats), collision avec des parois vitrées/fenêtres d’immeubles, circulation automobile, lignes électriques, etc. Mais, au-delà du nombre d’oiseaux tués, ce sont les espèces impactées, ordinaires ou pas, menacées ou pas, qui déterminent l’impact effectif d’un parc éolien.

Cet article est issu d’un travail collectif mené par Enercoop, Énergie Partagée et Terre de liens pour comprendre et donner des clés de réponse sur les liens entre transitions agricole et énergétique, en s’appuyant sur le travail de décryptage de l’Association négaWatt et Solagro, et avec le soutien de l’Ademe. En savoir plus.

  1. Biodiversité. Les chiffres clés. Edition 2018. DATALAB. Ministère de la Transition Écologique et Solidaire.
  2. Base de données de la mortalité des oiseaux due aux éoliennes : « Vögel in Europa » in https://lfu.brandenburg.de/cms/detail.php/bb1.c.312579.de
  3. The effect of light characteristics on avian mortality at lighthouses. Jason Jones and Charles M. Francis. Journal of avian biology. 34. pp. 328-333. 2003.
  4. Suivi ornithologique des parcs éoliens du plateau de Garrigue Haute (Aude). Ademe. Juin 2002.
  5. Le parc éolien français et ses impacts sur l’avifaune. Étude des suivis de mortalité réalisés en France de 1997 à 2015. LPO France. Juin 2017.
  6. Étude d’impact : parc éolien en mer des Iles d’Yeu et de Noirmoutier, ses bases d’exploitation et de maintenance et son raccordement au réseau public de transport d’électricité. Document 1 : résumé non technique du programme. Mars 2018. Éoliennes en mer Iles d’Yeu et de Noirmoutier. RTE. http://www.vendee.gouv.fr/IMG/pdf/5.1.eie_doc1_rnt.pdf
  7. Base de données de la mortalité des chauves-souris due aux éoliennes : « Fledermäuse in Europa » in https://lfu.brandenburg.de/cms/detail.php/bb1.c.312579.de
  8. Lignes directrices pour la prise en compte des chauves-souris dans les projets éoliens. Actualisation 2015. L. Rodrigues, L. Bach, M.-J. Dubourg-Savage, B. Karapandža, D. Kovač, T. Kervyn, J. Dekker, A. Kepel, P. Bach, J. Collins, C. Harbusch, K. Park, B. Micevski, J. Minderman (2015). EUROBATS Publication Series N° 6 (version française). UNEP/EUROBATS Secrétariat, Bonn, Allemagne, 133 p.
  9. Chiroptères et infrastructures de transports terrestres. Menaces et actions de préservation. Sétra. Novembre 2009.
Crédit photo : Milan noir – Abies