La rénovation énergétique des bâtiments : pourquoi, comment ?

La loi de transition énergétique d’août 2015 définit un objectif de rénovation de l’ensemble du parc bâti français à un niveau basse consommation d’ici 2050. Mais comment atteindre cet objectif ? À quoi correspond-il ? Quelle stratégie mettre en œuvre pour y arriver ?

La loi de transition énergétique d’août 2015 définit un objectif de rénovation de l’ensemble du parc bâti français à un niveau basse consommation d’ici 2050. Mais comment atteindre cet objectif ? À quoi correspond-il ? Quelle stratégie mettre en œuvre pour y arriver ?

Pour rénover de façon performante un bâtiment, deux stratégies sont envisageables : la rénovation par étape, qui verra se succéder sur plusieurs années les différents travaux nécessaires pour arriver au seuil de performance visé (remplacement des fenêtres, isolation des murs, sol et toiture, installation de système de chauffage et de ventilation performants, etc.) ; et la rénovation globale, qui consiste à réaliser en une seule fois l’ensemble de ces travaux. Si la première est plus simple à mettre en œuvre, elle s’avère moins efficace, aussi bien d’un point de vue technique qu’économique. La seconde nécessite par contre la présence d’une offre technique et financière adaptée.

Un objectif national de rénovation thermique performante

Pour répondre aux défis climatiques, énergétiques, économiques et sociaux (précarité énergétique), la « loi sur la transition énergétique pour la croissance verte », votée à l’été 2015, affiche l’objectif suivant : « disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes “bâtiment basse consommation” ou assimilées, à l’horizon 2050, en menant une politique de rénovation thermique des logements concernant majoritairement les ménages aux revenus modestes »1. Autrement formulé, tout bâtiment, et en particulier tout logement, doit donc être à un niveau performant en 2050.

Qu’est-ce qu’une rénovation performante ?

Pour correspondre aux normes « bâtiment basse consommation », un bâtiment rénové performant est isolé en toiture (30 à 40 cm d’isolant), sur les murs (12 à 18 cm, par l’intérieur ou l’extérieur) et si possible au sol (5 à 10 cm). L’étanchéité à l’air est bonne (moins de 3 volumes/h, voire 1 volume/h), les menuiseries extérieures sont performantes (double vitrage avec argon et vitrages peu émissifs, ou triple vitrage), le chauffage et le système de ventilation sont bien dimensionnés et efficaces (poêle ou chaudière avec un rendement élevé, supérieur à 75 %, et ventilation double flux).

Comment atteindre ces niveaux de performance ?

Pour atteindre un niveau basse consommation, deux stratégies sont envisageables : rénover en plusieurs fois, par étape ; ou effectuer une rénovation globale, sur l’ensemble des postes (isolation sol/murs/toiture, fenêtres, ventilation, chauffage et eau chaude).

La rénovation par étape

La rénovation par étape est celle la plus couramment observé aujourd’hui. La plupart du temps, les propriétaires effectuent un seul type de travaux à la fois : remplacement d’une chaudière, changement des fenêtres, isolation des combles, etc. Cette stratégie au coup par coup se fait au gré des nécessités du propriétaire (chaudière en panne) et de ses possibilités financières du moment.

La rénovation par étape a l’avantage de ne mobiliser qu’un corps de métier à la fois, pour un budget de travaux limité. Elle ne nécessite pas de définir un programme global de travaux, et s’avère donc plus simple à mettre en œuvre pour le propriétaire.

Cependant, pour arriver à un niveau de performance basse-consommation, cette stratégie se heurte à plusieurs obstacles.

D’abord, l’enchaînement à plusieurs années d‘intervalle des différents travaux à réaliser ne permet pas la meilleure optimisation des choix techniques. Par exemple, isoler la toiture sans changer la chaudière va conduire à des surconsommations, car la chaudière sera surdimensionnée, et fonctionnera donc avec un rendement dégradé (les rendements les plus élevés sont obtenus quand les poêles ou chaudières fonctionnent « à plein régime »).

Ensuite, une rénovation en plusieurs étapes entraîne nécessairement un coût final plus élevé. Les artisans doivent effectuer davantage de déplacements, et la préparation du chantier doit être répétée à plusieurs reprises.

Par ailleurs, l’enchaînement des étapes peut conduire à des risques de pathologies ou de dégradation de matériaux. Le remplacement des fenêtres, donc le renforcement de l’étanchéité à l’air, sans mise en place d’un système de ventilation performante, risque de conduire à des déficits de renouvellement de l’air intérieur et de provoquer par exemple des moisissures et une augmentation des concentrations en polluants dans l’habitation.

Enfin, une rénovation par étape ne permet pas d’effectuer un test d’étanchéité à l’air : le mettre en œuvre n’a pas de sens si seules les fenêtres ou la chaudière ont été remplacées, puisque les autres postes n’ont pas été traités (étanchéité à l’air de la toiture, des passages de gaine, etc.). Pourtant ce test, s’il est programmé au bon moment dans une rénovation globale, permet de corriger les défauts d’étanchéité à l’air d’une habitation, et donc d’améliorer le confort thermique tout en réduisant les consommations de chauffage.

La rénovation globale

La rénovation complète et globale vise à effectuer tous les travaux permettant d’atteindre un niveau basse consommation, en une seule fois.

Elle permet d’optimiser les coûts de la rénovation, d’atteindre une meilleure performance énergétique, et limite la durée des travaux dans le temps. Le propriétaire a ainsi, dès la rénovation terminée, un bâtiment faiblement consommateur d’énergie, sans devoir supporter à différentes reprises les contraintes inhérentes à chaque chantier (bruit, poussières, dérangement, etc.).

Elle gagne à être mise en œuvre préférentiellement lors des mutations de bien immobilier (ventes, donations), donc lorsqu’ils sont inoccupés, mais peut aussi être mise en œuvre lorsque le bâtiment est occupé.

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Figure 1 : Comparatif entre une rénovation globale et une rénovation par étapes.

Si elle présente de multiples avantages, la rénovation globale est aujourd’hui rarement observée sur le terrain, freinée par deux principales limites :

  • elle nécessite la présence de professionnels compétents et coordonnés (maîtres d’œuvre et/ou groupements d’artisans) pour accompagner le propriétaire dans l’ensemble de ses travaux. Aujourd’hui, la grande majorité des artisans ne propose pas de solution complète de rénovation ;
  • elle requiert une offre financière adaptée, car le maître d’ouvrage doit mobiliser un investissement important. La multiplicité des aides financières et critères d’éligibilité ne favorise pas la meilleure efficacité des fonds publics, ni leur attractivité pour les propriétaires.
Pour atteindre une rénovation complète du parc immobilier, la généralisation de la rénovation globale semble la stratégie la plus efficace : moins onéreuse sur le long terme, elle permet une meilleure optimisation des choix techniques. Sur le terrain, elle reste cependant freinée par le manque de solutions techniques et financières adaptées. Partant de ce constat, plusieurs dispositifs de rénovations complètes sont mis en place en France2, cherchant à combiner offre technique performante et offre financière adaptée. En dehors de ces rares initiatives, la rénovation par étape reste bien souvent la norme pour la quasi-totalité des travaux effectués.

Pour aller plus loin

  1. Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, article 1.
  2. Dispositif DORéMI (Dispositif Opérationnel de Rénovation énergétique des Maisons individuelles) porté par l’Institut négaWatt et Enertech, dispositif Rénovateurs BBC porté par la Région Basse-Normandie, etc.
Crédit photo : Olivier Sidler (DORéMI)